vendredi 2 mars 2012

De l'usage de Google Translator.

N'allez pas dire que je suis une grenouille de bénitier, mais une fois encore, c'est dans une église que cet article trouve son origine. Etant donné le nombre d'églises et le nombre de bars que l'on trouve à Cracovie, il est probable que la majorité des publications de ce blog trouvent leur inspiration dans l'un de ces lieux!
Alors voilà: il y a deux semaines, je vais toute contente à la messe en français. je suis tombée sur les horaires des cultes en langues étrangères par hasard en feuilletant un magazine touristique de Cracovie. Au delà du fait que je trouve juste incroyable de trouver une telle information dans ce type de publication, je me dis chic, dimanche, je vais comprendre l'homélie!
Me voilà donc à l'heure dite à l'église St Jean. Je me paye même le luxe d'arriver 10 minutes en avance. Une fois n'est pas coutume, mais je pense que je vais prendre de bonnes habitudes à ce niveau là durant mon séjour en Pologne (cf mon précédent post). La messe débute dans 5 minutes, le prêtre est en train de papoter avec quelques fidèles, on répartit rapidement les lectures, on tente de calmer les enfants qui chahutent un peu, on les installe tant bien que mal, on leur sort coloriages et autres livres de messe...
Drelindindin! Le tintement de la clochette qui marque le début de la messe me rappelle que je suis en Pologne et non en france. Le célébration commence, donc. Et finalement, c'est un amalgame un peu bâtard entre usages et pratiques français et polonais. 
Une différence concerne les chants et leur animation. En Pologne, point de chef de choeur ou d'âme charitable à la voix plus ou moins assurée qui bat comme il peut la semoule face à l'assemblée, accompagné par une grenouille de bénitier qui plaque des accords approximatifs. Non non! D'abord, l'orgue est de toutes les messes, et puis les chants sont entonnés par une personne à la jolie voix travaillée dissimulée je ne sais où (je pencherais pour quelque part du côté de l'orgue mais ça reste à vérifier). Ca rend super bien au cours d'une messe polonaise, et on sent l'importance de ce qui se vit. Maintenant, si vous appliquez ce fonctionnement à une assemblée française, le résultat est moins convaincant. Premièrement, vous ne vous entendez pas chanter. L'orgue est très triomphant, la préposée au chant met du coeur à l'ouvrage, et les 8 autres personnes qui participent à la messe chantent, en bon Français qu'ils sont, du bout des lèvres. Le rendu n'est pas top top, croyez-moi! Ce sentiment de malaise est renforcé par le fait que ladite préposée est polonaise. Je n'ai aucun problème avec les Polonais, je vis au quotidien avec trois d'entre eux. Simplement, un Polonais qui chante un chant français ne le chantera pas de la même manière qu'un français. A cause du rythme de la langue, à cause de la prononciation, parfois laborieuse, et puis tout simplement parce qu'il n'a pas l'usage de ce chant. Un chant, ce n'est pas seulement des notes, des rythmes et des paroles écrites, c'est aussi la manière de le chanter. En tant que Français, on sait où on a l'habitude de ralentir, où on fait une petite faute de rythme ou dans la mélodie. Et même si ces petites erreurs sont parfois (souvent) inconscientes, elles font partie du chant. J'ai eu le même sentiment lors du Credo et du Notre Père. Le prêtre qui célébrait était lui aussi polonais. Et bien de la même façon, s'il connaît les paroles du Credo et du Notre-Père comme toutes les personnes de l'assemblée, il n'en connaît pas le rythme, il ne sait pas où nous avons l'habitude de faire une pause, de reprendre notre respiration. J'ai trouvé que ces deux prières ont été dites à fond de train, et cela m'a beaucoup troublée. Une fois de plus, les repères sont faussés!

Cet épisode a fait écho en moi à une autre expérience faite cette fois-ci aux Etats-Unis l'hiver dernier. Nous avions fait le projet, avec une amie, de concocter un bon petit repas français pour faire découvrir à nos familles d'accueil un peu de notre pays. Nous avons passé l'après-midi en cuisine, pour, le soir venu, présenter et partager notre "french dinner" avec nos "host families". On avait mis les petits plats dans les grands, dressé une table et tout et tout. Et bien en à peine une heure, les plats étaient avalés, la bouteille de vin vidée, le fromage mangé de très étrange façon, mais qu'importe, le dessert englouti, la table débarrassée. Et voilà. On a mangé, c'était bon, Point. Pas vraiment de discussions, pas de temps mort entre les services, pas de tisane ou de café ensuite. Finalement, le dîner n'avait de français que la cuisine. Le déroulement en fut américain. je pensais naïvement que le fait de préparer des plats français rendrait leur partage français!! 

J'en suis donc venue à me demander comment les cultures doivent être en relation les unes avec les autres. Clairement, ces deux expériences n'ont pas été convaincantes. Toutes les deux partaient d'une intention positive, avaient pour but un projet intéressant ou utile, mais pour autant à l'arrivée, je suis restée sur ma faim... Pourquoi? C'est difficile à exprimer. J'ai réalisé qu'une culture est vivante et doit s'incarner. Une culture ce ne sont pas seulement des coutumes, des recettes de cuisine dans un beau livre, des poèmes, une histoire et des héros nationaux. Une culture n'est une culture que si elle est portée par un peuple, si elle est modelée par lui, pratiquée, secouée, vécue. Mais pour qu'elle soit vraie, authentique, je pense qu'elle doit l'être par ceux qui justement sont modelés et unis par elle. Il y aurait donc une relation de réciprocité entre ces deux éléments: c'est parce que cette culture est mienne que je suis en mesure de la pratiquer et de la faire vivre. Cette supposition paraît étrange, mais enfin, sans ça, pourquoi moi, Française, ne pourrais-je pas me comporter comme une vraie Polonaise à condition de respecter des règles qui seraient inscrites dans une méthode de culture polonaise? Et pourquoi cette messe sonnait-elle faux (je ne parle pas des chants)? Et pourquoi ce repas n'avait-il de français que le contenu des assiettes? 


Il me semble, que le problème réside dans le fait que dans ces deux situations, on a voulu superposer deux cultures, adapter la pratique de l'une à l'usage de l'autre. En fait, c'est comme utiliser Google Translator. On a tous déjà utilisé Google Translator pour traduire un article et en comprendre les grandes lignes. Le résultat final n'est jamais ni du français, ni de l'anglais, ni aucune langue. C'est une succession de mots plus ou moins cohérente qui permet de saisir globalement le sens du texte ou de la phrase, mais qui n'est pas entièrement satisfaisant. Et bien voilà, je crois que les deux expériences que j'ai vécues se rapportent à cela: mettre une action à réaliser dans la case de gauche, en mode français, sélectionner le mode polonais ou américain pour la case de droite, celle du résultat, cliquer sur "Réaliser", et appliquer les informations qui s'affichent. Le résultat n'a finalement  été ni français, ni polonais, ni américain. Comme je l'ai dit plus haut, cela donne un résultat bâtard et insatisfaisant. 




L'échange culturel est formidable et très positif, j'en suis persuadée. C'est d'ailleurs un sujet qui me passionne. Ces deux événements m'ont tellement frustrée que je ressens maintenant la nécessité de découvrir la meilleur façon de la pratiquer. 
Suite au prochain épisode, donc, et souvenez-vous,  Google Translator n'est bon qu'à dénaturer ce qu'on lui donne! ;)





Mi.

jeudi 23 février 2012

Le Ciel m'est tombé sur la tête

Il faut absolument que je vous raconte! Tellement absolument que je me suis dépêchée de rentrer chez moi pour tout vous dire et vous partager ce à quoi ressemble un Mercredi des Cendres ici, en Pologne. Croyez-moi, c'est quelque chose! J'espère seulement que mes mots seront à la hauteur de l'évènement, car vraiment, vraiment, c'est un truc de malade pour la Française que je suis.

Mise en situation: nous sommes mercredi 22 février 2012, jour de première pour moi: premier cours à la fac et première messe des Cendres polonaise. Je vous passe les détails sur Milouze qui galère à trouver sa salle de cours parce qu'elle a oublié d'en noter le numéro et qui ne ne souvient pas du nom du cours en polonais et j'en viens directement à l'affaire qui nous intéresse, the big event of the day: la Messe des Cendres. Je parle de the Big Event a posteriori, car avant 16h45 hier, je ne me doutais pas que le Ciel avec un grand C allait me tomber sur la tête!

Et puis, pour tout vous dire, je ne me préoccupais pas trop de cette messe. Non qu'elle ne soit pas pas importante à mes yeux, mais bon, il doit y avoir une centaine de messes par jour à Cracovie, donc Je ne me faisais pas trop de souci pour en dégoter une à un moment ou à un autre de la journée. J'avais quand même déjà repéré l'église des Dominicains, pas loin du Rynek Glowny (comprenez la grande place du Marché), le coeur de la ville. Une église plutôt maousse je dois dire, dans laquelle pas moins de 5 messes sont célébrées chaque jour en semaine, et je ne parle pas des offices des moines. Nous sommes donc en fin d'après-midi, il est 16h45. J'ai bu un petit thé avec la bande des Erasmus, Mercredi des Cendres oblige, ai fait un saut au Consulat pour m'inscrire sur les listes consulaires, élection présidentielle oblige, et dévoré un bouquin d'Henri Troyat à la bibliothèque de l'Institut Français.
Aperçu de l'entrée de l'église
Derrière moi ledit Institut dont je viens de fermer la porte, devant moi, l'église des Dominicains. Et un flot de personnes ininterrompu s'y engouffrant. Outch! Sérieusement, on aurait dit les abords d'une salle de concert ou de l'Opéra avant une représentation.
Et là, dans ma tête, je me demande vraiment dans quel pays je suis tombée... Tu sais, quand tu te retrouves devant une scène ou une situation que tu ne parviens pas à expliquer, que tu ne peux pas analyser. Ton cerveau a beau faire tous les efforts, comme ça ne fait référence à rien, il lui est impossible de décrypter ce qu'il se passe. C'est un peu comme si tu me demandais la signification d'un graphique ou d'un savant dessin d'ingénieur. Je sais ce que c'est, mais ça me dépasse, et je ne pourrais pas te dire le pourquoi du comment. Enfin bref, toujours ébahie et du coup moins assurée, va savoir pourquoi, je me dirige  vers l'entrée, en espérant trouver encore une place pas trop au fond de l'édifice. D'accord, ce n'est pas ça qui m'aidera à mieux comprendre ce qui se racontera, mais quand même. Je pénètre donc dans l'église, et là, deuxième surprise, elle est déjà bondée. Les chaises d'appoint sont toutes dépliées et ont trouvé preneurs, les allées latérales sont déjà bien encombrées. Okay, c'est mort pour la place assise, essayons alors de trouver un petit coin qui permette et de s'asseoir (une marche ou quelque chose de ce genre), et d'y voir quelque chose. Peine perdue. Après avoir fait un petit tour, me revoici au fond de l'église où je vais passer l'intégralité de la célébration. 
Vue sur les confessionnaux, côté droit*


Vue de l'allée centrale *


Je me pose (façon de parler) et je prends le temps d'halluciner, je vous invite à faire de même: Attendez, on est mercredi, il est 16h50, la messe commence dans 10 minutes, l'église est bondée et les gens continuent d'affluer...

Ils sont fous ces Polonais! 

Ou peut-être simplement catholiques pour de vrai...

Toujours est-il qu'au moment où le tintement de la clochette annonce le début de la messe, on se marche dessus, dans les allées latérales comme dans l'allée centrale. Oui, les allées sont pleines à craquer. Et encore, les confessionnaux situés sur les côtés (8 en tout), sont occupés! un truc de malade, je vous dis! Les gens se confessent avant et pendant la messe! La photo aurait valu le coup, mais je n'ai pas osé sortir mon appareil. Là, je souris, et je projette la même situation en France: en arrivant un quart d'heure avant le début de la célébration, je suis clairement en avance, si ça se trouve, l'église n'est même pas ouverte encore, et même si j'étais arrivée un peu juste, voire en retard, j'aurais toujours pu me rabattre sur le premier rang. Et puis, sans vouloir faire de mauvais esprit, la majorité de l'assemblée aurait eu 3 fois mon âge. La surprise est d'autant plus forte que l'église, la messe, représentent pour moi un univers connu, familier. Le sentiment d'être étrangère et d'être en décalage s'est donc fait plus fortement ressentir encore que pour la langue ou le rythme de vie, parce que je ne m'y attendais pas. Y'a pas à dire, les Polonais sont vraiment TRES catholiques. Et d'une ferveur! 


Bref, je sirote mon thé du soir, et je me dis que décidément, la Pologne est un pays bien particulier. Le parti anticlérical polonais s'est classé troisième aux dernières élections et je me demande où sont les personnes qui ont voté pour lui quand je vois l'affluence provoquée par la messe des Cendres.




Une chose est certaine: pour Pâques, je sais à quoi m'attendre! Une heure d'avance ne sera pas de trop pour au moins bénéficier d'une place assise!




Mi.


* Imaginez tout l'espace libre complètement bondé pour vous faire une idée de la chose. Notez l'escalier, à droite de la vue de l'allée centrale, remplissez-le  avec une foule,  multipliez par deux l'allée latérale et ses 4 confessionnaux, ajoutez des fidèles qui s'y confessent. Voilà, vous pouvez halluciner.

dimanche 19 février 2012

En voiture!





Une semaine de vie cracovienne, un nouvel appart en plein milieu de l'ancien getto de Cracovie, des colocs polonais dedans, pas un mot de français, une nouvelle fac, minuscule, quelques étudiants Erasmus, deux ou trois sessions skype pour raconter mes débuts, des températures pas si basses que ça (ouf), des magasins ouverts le dimanche dans le pays le plus catholique d'Europe, des gars qui tiennent des panneaux fléchés en face du magasin qu'ils indiquent des journées entières (si c'est pas clair, une photo suivra, don't worry), un Jeudi Gras au lieu du Mardi Gras, des mots imprononçables avec des Z partout, des gens qui ne sont pas fichus de m'appeler Marie-Liesse, un petit tour chez Carrefour (pour le camembert) et chez Ikéa pour l'ameublement (j'aurais mieux fait d'aller directement au sous-sol au lieu de faire deux fois le tour du parcours pour prendre trois références), des prix dérisoires, une souris dans l'appart... Et au milieu de toutes ces nouveautés, de ces observations, de ces étonnements, de ces sourires intérieurs, de ces incompréhensions parfois, une rengaine: "Tiens tiens, et si t'écrivais un blog, vieille?" C'est l'occasion où jamais d'avoir des choses intéressantes à raconter.

Ca fait une éternité que j'ai envie d'écrire un blog. J'ai toujours été épatée par ces (plus ou moins) anonymes qui parviennent à rendre intéressant et à donner du relief à des faits en soi pas spécialement emballants, par ceux qui réussissent, je ne sais comment, à retranscrire formidablement leur ressenti au point qu'on s'y croirait quand ils racontent, par ceux, aussi, qui te balancent toute une argumentation vachement bien ficelée relative à l'actualité ou à un phénomène de société. Bref, ces gens savent écrire! Fatalement, moi je me dis que tous ces gars là sont géniaux, qu'ils ont un don, que ce que j'écrirai, moi, ce sera super nul, et tout et tout, autant d'arguments plus bidons les uns que les autres pour me convaincre de ne pas écrire de blog alors que j'en meurs d'envie. Après réflexion, il semblerait que toutes ces pensées soient le fruit d'un mélange d'orgueil mal placé, de fausse modestie et de peur d'affronter le regard des autres... et de flemme. Je suis mal embarquée, n'est-ce pas? Oui parce que non seulement il faut assumer de ne pas être Hugo ou Bénéton (les Pipos savent de quoi je parle), mais en plus il faut se coltiner d'écrire régulièrement pour que ça vaille le coup. Et puis pas des "articles" de 5 lignes. Je veux dire, il faut que ce soit un minimum construit, que ça puisse intéresser mon lectorat (ça y est, je prends la grosse tête, je parle de vous comme d'un lectorat), et éviter de tomber dans les banalités concernant la composition de mon dernier déjeuner ou les commentaires creux sur le corps professoral de la fac.

Et là, je me suis réveillée, et j'me suis dit qu'enfin tout de même, un séjour en Pologne, ça n'est pas donné à tout le monde, que tous mes proches, ma famille, mes amis, mes potes, sont ravis pour moi, me considèrent comme ultra chanceuse, et je voudrais garder tout ce que je vais vivre pour moi toute seule alors que j'en connais un paquet qui aimeraient être à ma place? Oh non, ça ne serait pas chic du tout, mais alors pas du tout.
La voilà la solution: considérer les choses du point de vue de ceux qui comptent pour moi, et de l'Autre en général, pour avancer! Ne pas faire les choses pour moi, mais pour les autres! 
En fait, si j'écris ce blog, c'est par charité pour mon entourage qui crève de jalousie de me savoir dans la capitale étudiante polonaise, à mener la belle vie! 
Et voilà, j'ai retourné la situation: ce n'est pas moi qui veux écrire un blog pour étaler ma petite vie polonaise, ce sont les autres qui me le demandent, implicitement bien sûr. Comment leur refuser ce plaisir? Comment VOUS refuser ce plaisir? ;)

Je me lance donc, grâce à vous, grâce à l'ICES (Merci l'ICES) dans l'aventure du blog. Je suis contente d'avoir la possibilité de partager avec vous les moments que je vais vivre ici. A priori, si vous lisez ce blog, c'est qu'on a du se croiser, discuter, échanger, vivre ensemble plus ou moins longtemps. Bref, on a passé du bon temps, alors pourquoi s'arrêter? Parce que je suis à plus de 1000 km de vous? L'argument à deux sesterces!!! Vous allez kiffer la vie polonaise avec moi, et on va s'éclater!




Alors en voiture! :)














Dernière précision avant de poster ce premier message (je retarde l'échéance inconsciemment, je crois!): malgré le nom de ce blog, "Pologne Pipelette", je ne compte nullement vous assommer de futilités et d'inepties (Je ne garantis pas non plus de ne publier que le fruit de mes réflexions les plus abouties). Seulement, comme il a bien fallu baptiser ce journal, j'ai décidé de le faire en référence à tous mes collègues de la célèbre et extraordinaire promo Sciences Pipo qui sont comme moi en ce moment à l'étranger. Un Pipo, une Pipelette, le titre était trouvé. 





Bon voyage! :)

Mi.